À l'origine de l'augmentation des transferts en provenance de l'étranger : la stabilité politique dont a bénéficié le pays du Cèdre au lendemain des accords de Doha en mai 2008, qui a encouragé les émigrés à poursuivre l'envoi d'argent vers le Liban. Mais aussi la résilience dont a fait preuve l'économie libanaise face à la crise internationale. Celle-ci a encouragé de nombreux expatriés à placer leur argent dans leur pays natal, considéré à l'époque comme une terre refuge. Dans l'autre sens, les flux sortants, intrinsèquement liés à l'évolution de la conjoncture locale et internationale, ont eux aussi profité de la stabilité politique et de la crise financière internationale. Ainsi, avec les taux de croissance élevés enregistrés au Liban entre 2008 et 2009, il était normal que ces transferts augmentent. Selon l'économiste Nassib Ghobril, cette stabilité politique couplée à une forte croissance économique avait entraîné une hausse des opportunités d'emploi pour les travailleurs étrangers peu ou pas qualifiés, notamment dans le secteur de la construction, d'où la croissance des transferts d'argent sortants.
Reste que l'évolution des flux sortants (+31,8 % entre 2008 et 2009) a été nettement supérieure à celle des flux intrants (+5,5 % au cours de la même période), ce qui pourrait nuire à l'économie libanaise. En effet, selon l'économiste Paul Doueihi, la hausse des transferts d'argent en partance du pays influe négativement sur le solde de la balance des capitaux, et donc sur la balance des paiements. Celle-ci a, rappelons-le, enregistré un déficit de plus de 660 millions de dollars au cours des deux premiers mois de 2011. « À cela s'ajoute le manque à gagner, en termes de consommation interne ou d'investissement, découlant de la fuite de ces montants », qui représentent quelque 17 % du PIB, ajoute Paul Doueihi.
Cet avis ne fait toutefois pas l'unanimité ; selon l'économiste Louis Hobeika, la hausse des flux sortants est un facteur positif. « C'est un signe que le Liban attire les travailleurs étrangers (...) et que les besoins de notre marché, en matière de main-d'œuvre, sont totalement ou partiellement comblés », souligne-t-il.
La tendance va-t-elle se poursuivre en 2011 ?
En l'absence de chiffres sur les transferts sortants en 2010, il est difficile d'estimer si l'écart entre les transferts intrants et sortants s'est rétréci davantage l'an dernier ou encore si la tendance se poursuivra en 2011. Selon Nassib Ghobril, la crise actuelle dans le monde arabe pourrait néanmoins affecter l'évolution des flux intrants et sortants si l'effet domino se propageait aux pays du Golfe. En effet, une grande partie des transferts d'émigrés émane de cette région, jusque-là épargnée par les troubles régionaux. Quant aux transferts à partir du Liban, ils seraient également affectés dans ce cas de figure, vu que la majeure partie des investissements arabes au Liban provient des riches monarchies pétrolières. « Si les investissements étrangers reculent, les projets, autant dans le secteur de l'immobilier que dans d'autres secteurs, risquent en effet de racornir, ce qui affecterait l'emploi des travailleurs étrangers et par conséquent le montant des transferts en partance du Liban », explique à cet égard un expert sous couvert d'anonymat. En somme, l'écart entre les flux intrants et sortants pourrait donc se stabiliser, selon lui. Pour l'économiste Nassib Ghobril, « la crise arabe ne devrait toutefois pas avoir d'impact majeur sur la situation des travailleurs étrangers au Liban (...) ni sur leurs transferts à l'étranger », ce qui pourrait se traduire, selon lui, par un maintien de la tendance amorcée en 2008.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire